La mobilité des personnes âgées, un angle mort des politiques publiques

Luc Carvounas, coprésident de la commission sociale de l’Association des maires de France, est formel : « Je ne connais aucun de mes collègues qui n’ait mis en place, à l’usage des seniors, des navettes de service ou de covoiturage pour répondre à leurs besoins médicaux ». rendez-vous ou accéder aux programmes culturels de leur ville ». Malgré la mobilisation des élus sur le terrain, la mobilité des seniors reste « une politique de transports en commun extrêmement dévoyée », estime Eric Chareyron, sociologue et futur directeur, art de vivre et mobilité des territoires au sein de Keolis. Dans les grandes villes, l’offre est abondante mais insuffisante. En milieu rural, elle est absente et condamne les usagers à utiliser leur voiture si cela leur est encore possible. Selon l’Enquête nationale transports et déplacements 2019, la majorité des plus de 75 ans utilisant une voiture est en augmentation (56 %), tandis que celle des marcheurs (37 %) et des adeptes des transports en commun (5 %).

Magnifique? Au printemps 2021, une enquête Transdev a révélé que seulement la moitié des seniors envisageaient de reprendre les transports en commun. Alors que cette population est appelée à croître, elle semble découragée par « l’expérience terrifiante » des bus, métros et trains de banlieue, résument les experts. Les raisons invoquées sont multiples : timing insuffisant aux heures creuses et promiscuité forcée aux heures de pointe ; manque de places assises et air suffocant, en été, manque de climatisation systématique, infrastructures inadaptées, interlocuteurs menacés ; il faut souvent monter et descendre des escaliers, utiliser des outils numériques complexes, se fier à une signalétique illisible. Beaucoup regrettent également que les gares SNCF aient abandonné les grands écrans au profit d’écrans plats avec des caractères trop petits. Cela s’applique également à la signalisation des abribus dans certaines grandes villes.

La SNCF pionnière. Pourtant, le vote fin 2019 de la loi d’orientation sur la mobilité, plus connue sous le nom de LOM, qui vise à « rendre les transports du quotidien plus faciles, moins chers et plus propres », a mis la pression sur les opérateurs. D’autant plus « que de plus en plus d’élus relayent les critiques des seniors », confie une bonne source. Du fait des partenariats avec les associations, le cahier des charges des communes évolue. Les opérateurs les plus matures, comme la SNCF, l’un des pionniers en la matière, sont ceux qui ont mis en place des services accessibilité au profit des personnes en situation de handicap, confrontées exactement aux mêmes problématiques que les seniors. Les sociétés de transport public lancent des stages de conduite pacifique pour leurs chauffeurs de bus. Dans les zones rurales, des startups de covoiturage sont créées pour gérer les trajets domicile-travail. Mais rares sont ceux qui, comme « Ma Course SNCF », entendent « faciliter le quotidien des jeunes, des sans-permis et des seniors ». Ce service a été testé dans cinq villes entre Le Mans et Tours de février 2021 à juillet 2022 et a généré 700 comptes. Il sera dupliqué dans d’autres domaines sur demande, précise la SNCF.

Le géant ferroviaire a imaginé cette solution pour prolonger ses billets de train. Objectif atteint car l’offre « station » représente plus de 40% des achats ; les trois autres options sont : « commerces et services », « loisirs », « école ». En déployant sa stratégie expérimentale de reconquête de la clientèle en milieu rural, les ingénieurs construisent les pans de deux autres alternatives innovantes à la voiture individuelle. Pour remplacer les TER vides et chers, ils esquissent un nouveau concept de métro léger : l’autorail Draisy. Destiné aux lignes de 100 km, adapté pour 80 passagers dont 30 assis, l’engin s’arrête sur demande. Grâce à la batterie électrique, l’impact sur l’environnement sera réduit. Premiers tests en 2025. Plus révolutionnaire, un deuxième projet vise à exploiter les petites lignes de 10 à 30 km qui ont été fermées faute de trafic. Il s’agit de la navette ultra-légère 9 places « Flexy ». Entièrement autonome, il pourra quitter les rails pour prendre la route et effectuer des tournées de pick-up. En collaboration avec le constructeur automobile Stellantis, la SNCF teste actuellement les différentes briques du futur système de conduite autonome sur l’ancienne ligne Nantes-Doulon-Carquefou. Un site unique en France.