Lucas Chancel, homme d’affaires : « Les 10% les plus riches ont cinq fois plus de carbone que la moitié la plus pauvre de France »

Interview « La chaleur humaine » (3/5). Cet été, « Le Monde » propose des épisodes de son podcast consacrés au défi climatique. Lucas Chancel, co-directeur du Laboratoire des inégalités globales, rappelle que la lutte contre le réchauffement climatique et la lutte contre les inégalités doivent aller de pair.

Les 1% les plus riches émettent autant de gaz à effet de serre que les 50% les plus pauvres de la planète… Tirées du dernier « Global Inequality Report », un ouvrage coordonné par un groupe d’économistes dirigé par Thomas Piketty, ces données interrogent sur le ciblage. de la transition, afin qu’elle ne génère pas plus d’inégalités qu’il n’en existe déjà et que les efforts se concentrent sur ceux qui ont la plus mauvaise empreinte carbone. Lucas Chancel, l’un des auteurs de ce rapport, plaide pour que la lutte contre le changement climatique soit conçue pour réduire massivement les inégalités, tant dans le monde qu’en France.

Vous estimez aberrant de tenter de résoudre le problème du changement climatique sans s’attaquer en même temps à la question des inégalités. Pouvez-vous nous expliquer pourquoi ?

Chacun veut une planète désirable et est prêt à faire des efforts pour préserver l’habitabilité de la Terre afin de laisser à ses enfants ou petits-enfants un monde dans lequel ils pourront respirer. Les efforts pour y parvenir ne sont pas les mêmes pour tout le monde. Une personne qui a peu de revenus, peu d’économies, peu d’alternatives à l’utilisation de voitures ordinaires n’abordera pas ce débat de transition de la même manière que quelqu’un qui a de bonnes économies personnelles, peut acheter un véhicule électrique et rénover sa maison. Ces derniers peuvent facilement acheter des produits bio plus chers qui nécessitent moins de CO2 pour leur production, utilisent moins de pesticides, mais coûteront deux ou trois fois. Il y a un problème de justice sociale et un problème de répartition des efforts. Et je pense qu’en abordant ces questions, il est important de garder à l’esprit que tous les Français n’ont pas le même niveau d’émissions de carbone. Pourtant, c’est le point de départ à partir duquel des efforts sont nécessaires pour atteindre zéro carbone d’ici 2050. Car l’objectif ultime est que tout le monde atteigne zéro tonne de carbone d’ici 2050. Et le débat politique doit aider à décider du chemin à suivre pour y arriver.

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Les riches émettent plus que les pauvres, certes… Mais comment cela se traduit-il, concrètement ?

Pour donner un ordre de grandeur, un aller-retour Paris-New York correspond à une émission moyenne de 1,5 tonne de carbone. Or, en moyenne, un Français émet 9 tonnes de carbone par an, en tenant compte des émissions dites importées, c’est-à-dire celles qui ont été fabriquées en Chine pour produire les biens que nous consommons ici en France. A voir aussi : Salutations du Grand Paris : 5 photos à découvrir aux quatre coins de la région. Alors, ces 9 tonnes ne s’arrêtent pas à l’essence que l’on met dans notre voiture ou au gaz qui est derrière l’électricité qui va servir à allumer nos télévisions ; ils tiennent également compte du pétrole ou du charbon utilisé dans la fabrication du téléviseur.

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