Mobilité : « Nos véhicules sont très gros par rapport à nos besoins quotidiens »

Peut-on se fixer les mêmes objectifs de décarbonation pour les zones rurales que pour les villes, sachant qu’elles sont plus dépendantes de la voiture individuelle ?

La France s’est fixé pour objectif de décarboner complètement les transports terrestres (voitures, véhicules utilitaires, camions, etc.) d’ici 2050.

Peut-on se fixer les mêmes objectifs de décarbonation pour les zones rurales que pour les villes, sachant qu’elles sont plus dépendantes de la voiture individuelle ?

La France s’est fixé pour objectif de décarboner complètement les transports terrestres (voitures, véhicules utilitaires, camions, bus, etc.) d’ici 2050. Il s’agit d’un objectif valable pour l’ensemble du territoire. Les moyens de sortir du pétrole ne peuvent pas être les mêmes partout. Certains territoires n’ont pas les mêmes atouts. Nous devons adapter les transformations et répondre à différents leviers : demande de transport, report modal, facteur de charge, efficacité énergétique des véhicules et intensité carbone de l’énergie.

Quelles sont vos recommandations pour décarboner les transports en milieu rural ?

Un premier levier consiste à répondre à la demande de transport et aux distances parcourues en ajustant la politique gouvernementale. L’objectif est de rapprocher les emplois, les entreprises et les services de la maison. Il faudrait un travail d’aménagement du territoire dans ce sens au lieu de penser que c’est à la voiture de combler les lacunes des services publics en comblant les distances.

Cela irait à l’encontre de ce qui aurait pu se passer dans ses dernières années…

En effet, ce n’est pas la tendance actuelle de regrouper les services dans les grands centres par métropolisation. Cela a pour conséquences négatives d’allonger les distances de transport pour accéder à un service particulier. Il faut inverser la tendance.

Ce serait une révolution dans la révolution, un véritable changement de paradigme.

Sans aucun doute. L’augmentation de la demande de transport est toujours perçue comme positive. Cela signifierait que l’économie se porte bien. Cependant, des coûts financiers, sociaux et environnementaux sont associés à cette augmentation. Plus le kilométrage augmente, plus nous consommons d’énergie, plus nous émettons de gaz à effet de serre et de polluants atmosphériques, plus il y a de bruit, d’accidents… La recherche de proximité, au quotidien, est une ambition déjà assez forte chez un certain nombre citoyens. La tendance à la délocalisation de l’économie mondiale vers des pôles plus régionaux ou la recherche d’une alimentation plus locale en sont également une illustration.

Comment se débarrasser de la voiture dans les zones mal desservies par les transports en commun ?

L’importance économique et environnementale du report modal de la voiture individuelle vers les transports en commun (train, bus, voiture, etc.) est d’autant plus évidente que les flux de déplacements sont massifs, ce qui n’est pas le cas en milieu rural. Quant au passage aux modes actifs (marche, vélo, etc.), ils sont plus faciles à utiliser lorsque les distances sont courtes, mais la croyance que le vélo n’est fait que pour les zones urbaines est un premier obstacle culturel à surmonter. Dans les zones rurales, il y a beaucoup de potentiel pour des trajets de 1-2 km à 5-10 km qui peuvent être effectués à vélo, à condition d’améliorer la sécurité. Un certain nombre de zones rurales investissent déjà dans ce domaine. L’Ademe lance des appels à projets liés à ces domaines.

Qu’en est-il du covoiturage et de l’autopartage ? Il est parfois difficile de s’y retrouver dans des systèmes qui peinent à se généraliser…

L’un des leviers de la décarbonation est d’améliorer le remplissage des véhicules. Il y a un vrai potentiel à la campagne. Aujourd’hui, la qualité de service n’est généralement pas suffisante avec le manque de plateformes et de communication, trop peu d’utilisateurs. Vous devez réussir à développer l’offre pour atteindre une vraie masse critique. Comme les autres modes de transport, ces services peuvent être subventionnés pour accroître leur attractivité.

Aménagement du territoire, report modal, partage de véhicules… Quels autres leviers actionner pour sortir du pétrole ?

Plus généralement, il faut trouver des véhicules plus sobres, c’est-à-dire plus légers, moins puissants, moins rapides que nos voitures actuelles. Avec leurs cinq places, un poids de plus d’une tonne et une vitesse maximale de 180 km/h, nos véhicules, uniformément, sont largement trop gros pour la majorité des usages quotidiens. En revanche, de nombreux quadricycles électriques plus légers, des voiturettes, des mini-voitures à une et deux places peuvent atteindre 80 km/h, mais sont moins chers à l’achat et consomment moins de carburant. Pour encore plus de sobriété, vous pouvez opter pour des vélos électriques dont certains roulent jusqu’à 45 km/h.