Pony : La startup bordelaise permet « d’adopter » le scooter ou le vélo.

08/08/2022 | Son vélo électrique unique, le Double-Pony, peut transporter deux personnes sans effort. Au-delà du véhicule, la start-up Pony développe un modèle participatif original.

Leurs vélos et trottinettes bicolores bleu et violet se distinguent déjà dans les rues de la ville de Bordeaux. Pony, startup Bordelaise et champion français des micro-véhicules en libre-service, espère bien s’imposer dans le cadre de l’appel d’offres lancé par la métropole et dont le résultat sera connu en septembre. Pour Aqui!, le fondateur Paul-Adrien Cormerais, livre sa vision des mobilités alternatives dans la métropole.

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@qui! : Avec « Adopte un poney » vous avez mis en place un système participatif unique pour engager les utilisateurs au quotidien, comment ça marche ?

P-A.C : Le principe est de rendre nos utilisateurs copropriétaires de la flotte. C’est aussi écrit sur les scooters : « J’appartiens à un Bordelais ». Tous nos véhicules appartiennent à un propriétaire qui récupère 50% des revenus de chaque trajet. C’est le modèle de long terme que nous voulons pour ces nouvelles mobilités pour éviter de devenir une grande multinationale qui envahirait les villes tout en étant complètement déconnectée de ses usagers et de leurs besoins. En se connectant sur notre site, les Bordelais « adoptent » un Poney, ils peuvent lui donner un nom, suivre les trajets de son véhicule. La perspective change : je ne contracte pas le service d’une multinationale, j’emprunte le vélo ou le scooter d’un voisin. Cela a deux effets : une réduction considérable du vandalisme et une expérience différente pour les utilisateurs.

C’est un modèle économique unique au monde, qui fonctionne très bien. En effet, nous ne pouvons plus adopter à Bordeaux : tous nos véhicules appartiennent déjà à quelqu’un. Dans tous nos marchés, nous avons plus de dix mille personnes sur la liste d’attente. Cela montre que les citoyens veulent s’impliquer dans l’évolution de la mobilité dans leur ville, quelque chose de concret qui a une valeur humaine et économique et qui améliore le cadre de vie.

@ ! : A Bordeaux, quelle est la situation actuelle de ces mobilités alternatives ?

P-A.C : Le marché bordelais est assez spécifique. On compte aujourd’hui une dizaine d’opérateurs, chacun avec sa façon de faire et un nombre de véhicules assez restreint : une centaine de scooters, six cents vélos. La ville a organisé un appel d’offres en début d’année pour choisir deux opérateurs par type de véhicule et simplifier le déplacement de l’usager. Les résultats seront connus en septembre. La compétition qui s’est déroulée à Bordeaux a été vertueuse au départ. En 2019, à l’ouverture du marché, on ne savait toujours pas quels étaient les bons opérateurs, le bon modèle de véhicule, le bon modèle d’exploitation, le bon modèle économique. Aujourd’hui, le parcours utilisateur doit être simplifié. Dans un marché plus mature, ce banc d’essai n’est plus nécessaire, mais il nous a permis de démontrer notre modèle économique.

C’est aussi une tendance de fond. Face à la saturation mécanique de l’infrastructure routière, il n’y a pas d’autre choix que d’évoluer vers de nouveaux modes de déplacement moins consommateurs d’espace. Soit les transports en commun, soit les micro-véhicules et souvent une combinaison des deux.

@ ! : Vous vous êtes présenté justement en réponse à cet appel d’offres de la Métropole de Bordeaux…

P-A.C : C’est un enjeu stratégique pour l’avenir de la ville. Hambourg compte déjà trente mille microvéhicules partagés. C’est plus que l’ensemble du parc en France. Il est probable que ces mobilités représentent 7,10% des déplacements dans une agglomération, surtout quand on arrive à les interconnecter avec les transports en commun : je descends de mon bus, il me reste deux kilomètres, si j’ai un scooter à disposition, Je terminerai mon voyage de manière pratique et confortable. Ce réseau donnera du sens à toutes les évolutions techniques et technologiques. Par conséquent, nous devons adopter une vision à long terme.

Pony est le seul acteur français et le seul acteur avec un modèle participatif. Notre plus grand concurrent aujourd’hui est Uber via sa filiale Lime. C’est la conquête américaine : on met de l’argent pour capter le marché. Si on laisse faire, les villes n’auront plus leur mot à dire face à un tel acteur.

@ ! : Chez vous, sans abonnement : on paye à la course. Pourquoi ce choix ?

P-A.C : Les seuls systèmes qui fonctionnent par abonnement sont les systèmes subventionnés. Chaque voyage a un prix de revient. Pourquoi les boulangeries ne font-elles pas un abonnement illimité ? Si nous faisons un abonnement illimité, il ne sera rentable que pour certains types d’utilisateurs et la plupart seront exclus.

Notre offre doit être considérée comme une solution de secours. Il n’est pas directement en concurrence avec d’autres comme le V3 car il est objectivement trop cher pour un usage courant. En revanche, lorsque l’on est pressé, pour un seul trajet en ville, c’est le moyen le plus fiable et le plus rapide. L’enjeu sera de comprendre comment ces services, très économes en énergie et très rentables, s’intègrent dans l’offre de transports en commun de la ville et comment la ville les utilise. Aujourd’hui, la discussion commence.

@ ! : Vous prévoyez dix mille véhicules à Bordeaux dans les prochaines années. Comment gérez-vous autant de choses sans que ce soit le chaos?

P-A.C : Nous appliquons des règles de stationnement. Si tout le monde fait quelque chose, ça ne marche pas. La clé est de trouver des règles simples et que le service fonctionne sans être pénible à utiliser. Aujourd’hui à Bordeaux, il existe des parkings exclusifs délimités par la ville et peints au sol. Il est uniquement autorisé de garer votre trottinette électrique dans ces espaces.

Pour les vélos, c’est un peu plus simple : vous avez le droit de stationner dans tous les supports à vélos de la métropole, qui compte déjà plus de quatre mille places de stationnement. C’est là que notre solution est pertinente : nous avons un réseau ultra-dense avec, en moyenne, une place de parking à moins de 100 mètres de toute destination. Il y aura toujours des abus avec des personnes qui ne respectent pas les règles, mais tout comme les automobilistes, ces personnes seront verbalisées.

@ ! : Il n’y a pas de bornes de stationnement, ni de bornes de recharge. Comment faites-vous fonctionner votre flotte ?

P-A.C : Les utilisateurs n’ont rien à faire ! La majeure partie de notre flotte est électrifiée avec des batteries amovibles. Nous venons avec nos vélos cargo électriques et remplaçons la batterie du véhicule si nécessaire. Intuitivement, on pourrait dire « c’est dommage, si on avait des bornes de recharge, ce serait plus pratique ». En réalité, non : le coût d’intervention de nos équipes est si faible que nous ne pourrions jamais rentabiliser l’installation de bornes qui nécessiterait de gros travaux sur toute la rue, pose de câbles, impliquant les Bâtiments de France… Des chantiers longs, compliqués et coûteux . Notre solution est très flexible, avec un coût de fonctionnement beaucoup plus faible. Pour rappel, les racines de Vélib remontent à 2007, six mois avant le lancement de l’I-phone. Les utilisateurs n’étaient pas connectés à Internet et sans système de paiement. Aujourd’hui, nous pouvons fonctionner différemment.

L’autre intérêt est la nouvelle source d’activité pour les acteurs de la logistique du cycle, un secteur souvent impliqué dans la réinsertion. A Bordeaux, nous travaillerons avec l’atelier Remuménage, pour la gestion du parc batteries.

Pony présente un nouveau véhicule, une première mondiale : le Double Pony. Il s’agit du premier vélo électrique biplace en libre-service. Le cadre, les freins, les roues, les pneus, l’équilibre du vélo, la puissance du moteur : tout est dimensionné pour pouvoir supporter une charge de plus de 250 kg. C’est un format « longtail », avec une banquette arrière, un guidon et des repose-pieds, deux batteries et une boîte de vitesses automatique à deux vitesses qui déplace deux adultes sans effort. Un véhicule que nous avons déjà croisé dans les rues de Bordeaux.

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