Transports en commun en Île-de-France : inflation, service qui se dégrade… et des usagers qui boivent ?

A Paris, les bus et les métros sont bondés, la circulation sur les RER D et B est très perturbée. Malgré ce service dégradé, les utilisateurs risquent de devoir payer plus cher leur abonnement l’année prochaine. Le montant du Pass Navigo – nom donné à l’abonnement mensuel – pourrait monter jusqu’à 100 euros, contre 75 aujourd’hui, a prévenu Valérie Pécresse (LR), présidente de la région et d’Île-de-France Mobilité (IDFM), l’organisme du transport. autorité Une solution qu’il dit vouloir éviter.

Selon le président de région, l’inflation énergétique grève considérablement les comptes, qui se sont déjà détériorés en raison de la pandémie de Covid-19 et de la baisse des revenus liée au manque de voyageurs. « Nous allons affronter la vague de 2023, avec une hausse absolument colossale des prix de l’énergie pour les transports quotidiens », a-t-il prévenu, ce mercredi 14 septembre, lors d’une réunion avec une association d’usagers.

Un budget à combler

« Pour Île-de-France Mobilités, cela se traduit par une augmentation de 950 millions d’euros des coûts d’exploitation du réseau », a-t-il précisé, sur un budget total de 11 milliards d’euros. Ceci pourrez vous intéresser : Millau : Moovit, une nouvelle application pour simplifier les transports en commun. « Nous avons trouvé 200 millions d’euros en interne, il nous reste 750 millions à trouver », a indiqué le président de région, prônant « un partage équitable de l’effort » pour éviter de faire supporter le surcoût uniquement par les usagers.

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Pour cela, l’ancien candidat à la présidentielle a dévoilé un plan ce mercredi 15 septembre. Elle consiste à demander une contribution supplémentaire aux collectivités locales – dont le budget est déjà fortement impacté par la hausse des prix – et à demander en plus à la RATP et à la SNCF, qui ont fait des bénéfices l’an dernier.

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L’État et les entreprises sollicitées

Valérie Pécresse compte aussi sur la participation de l’État. Elle a demandé au gouvernement de réduire la TVA sur les transports, et de la faire passer de 10% à 5,5%. Une proposition qui a reçu un accueil très mesuré, selon le président de la région. Voir l’article : L’Allemagne teste le ticket mensuel à 9 euros pour les transports en commun. L’État, dont le budget est déjà tendu pour faire face à la hausse des prix, est vraiment réticent à réduire ses recettes.

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Pour résoudre cette équation complexe, le président régional entend impliquer davantage d’entreprises. Il est prévu d’augmenter une taxe, la prime de mobilité, payée par les entreprises de plus de 11 salariés, dans certaines zones. Certaines figures de l’opposition à Valérie Pécresse appellent à aller plus loin.

Valérie Pécresse vient d’annoncer l’augmentation du Navigo

Pour cacher sa mauvaise gestion et son refus de faire payer les riches, Pécresse va emprisonner tous les usagers ! @jacquesbaudrier et @Fabien_GB94 font des propositions pour éviter la pénalisation des transports verts pic.twitter.com/Uk98N7zuU4

« Ce déficit énorme et dramatique est le résultat de la crise et surtout du refus de Valérie Pécresse d’impliquer [jusqu’à présent] les entreprises des secteurs les plus riches », ont réagi dans un communiqué Jacques Baudrier et Fabien Guillaud-Bataille, les administrateurs du PCF du PCF. Mobilité Île-de-France. Ils réclament la création d’une nouvelle zone, au centre et à l’ouest de Paris, où les entreprises concernées par la taxe paient davantage, ce qui rapporterait un milliard d’euros, selon eux.

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Les usagers vont payer

En attendant, même si chaque joueur s’en mêle, les utilisateurs risquent toujours de payer plus cher leur abonnement, qui n’a pas augmenté depuis cinq ans. Le président de région n’a toutefois pas prévu d’augmenter l’offre de transport, réduite depuis le début de la crise sanitaire. A voir aussi : Montayral : Le bus s’arrête deux fois. « Il ne faut pas rêver. Mais on ne le baissera plus », a déclaré Valérie Pécresse au Parisien mercredi 14 septembre.

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Cependant, les usagers peuvent être réticents à payer plus pour un service dégradé, notamment sur certaines lignes comme le RER. « Les gens sont revenus en général, même les touristes, l’offre réduite n’est plus vraiment justifiée », a déclaré Marc Pélissier, président de l’Association des usagers des transports de la région Ile de France, interrogé par Marianne. « Il semble que les usagers seront prêts à accepter une augmentation modérée, de l’ordre de 2 ou 3 %, mais si l’offre revient à la normale », poursuit Marc Pélissier. D’autant que la lenteur du service risque d’entretenir un cercle vicieux, dans lequel certains usagers s’éloignent des transports en commun, ce qui réduit également les revenus et donc les opportunités d’investissement.

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Un système en crise

Depuis la pandémie de Covid-19, c’est tout le système de financement des transports publics qui est fragilisé. Au total, depuis 2020, le secteur a perdu 2,5 milliards de revenus de la vente de billets, selon l’Union des transports publics et des chemins de fer (UTP). La dette d’Ile-de-France Mobilités a quasiment triplé à plus de 6 milliards d’euros, compliquant les investissements dans le renouvellement du réseau et la construction de nouvelles lignes. Une crise qui risque d’être encore aggravée par la hausse des prix de l’énergie.

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Cette situation délicate concerne la plupart des réseaux français, qui doivent encore opérer leur transition énergétique, et donc acheter des véhicules neufs, moins polluants, qui coûtent plus cher. Les managers doivent trouver de nouvelles ressources. Un rapport récent, commandé à l’ancien député PS Philippe Duron par le ministère de la Transition écologique, jugeait une hausse des prix inéluctable, tout en précisant que cette modification serait « d’autant plus légitime et acceptée que la qualité du service sera améliorée », et que la régulation du transport individuel motorisé visant à décourager la conduite en solo sera mise en place en même temps. » Il a également proposé de nouvelles taxes sur les poids lourds, le stationnement ou le e-commerce.

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Les responsables du secteur tournent enfin les yeux vers l’Etat, espérant la mise en place d’un plan d’investissement massif. « On a vu des milliards pour soutenir l’industrie aérienne, l’industrie automobile ou l’aide au carburant, mais il n’y a pas grand-chose pour les transports en commun », regrette aussi Marc Pélissier. Au risque de passer à côté d’un passage au « moins de voitures », qui semble possible dans les grandes villes.